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Collectivités territoriales : Délégation de fonctions et droit de priorité

Par un avis du 14 novembre 2012 à paraître au Recueil Lebon, le Conseil d’Etat est venu apporter deux précisions importantes relatives au retrait des délégations de fonctions des adjoints eu égard au droit de priorité de ces derniers sur les conseillers municipaux.

Certes, le Conseil d’Etat s’était déjà prononcé sur cette question (CE, 4 juin 1997, Commune de Bompas, req. n° 158246) en relevant que le droit de priorité constituait une condition de légalité du retrait d’une délégation à un adjoint, mais cette solution a été rendue avant une modification législative introduite par la loi n° 2002-276 du 27 février 2002.

Plus précisément, cette modification que l’on retrouve à l’article L. 2122-18 du CGCT, autorise notamment le maire a attribué des délégations de fonctions à des conseillers municipaux dès lors que les adjoints sont tous titulaires d’une délégation.

Aussi, depuis, se pose la question de savoir si le maire peut procéder au retrait des délégations qu’il a données à un adjoint sans pour autant être tenu de remettre en cause les délégations qui ont été attribuées aux conseillers municipaux.

Quelques décisions ont été rendues par les tribunaux et cours de l’ordre administratif sur ce point, mais elles étaient contradictoires (TA Rennes, 18 déc. 2003, M. Kuntz, req. n° 031537 ; TA Grenoble, 16 mars 2007, Mme Vo Thanh et autres, n° 0304126 ; voir les concl. de P. De Monte sous TA Montpellier, 22 oct. 2009, Mme Carabelli-Séjean, req. n° 085529, AJDA 2010. 157 ; CAA Paris, 23 novembre 2004, Cne de Chatou, req. n° 01PA01899).

Avec cet avis du 14 novembre, le Conseil d’Etat met fin aux débats en considérant que le maire peut retirer ses délégations à un adjoint :

  • pour autant que cette décision est motivée par un motif qui n’est pas étranger à la bonne marche de l’administration (voir par exemple : CE, 11 avril 1973, Nemez, Rec. 273 ; CE, 30 juin 1986, Cne d’Aix-en-Provence, req. n° 73093 ; CE, 25 oct. 1996, Commune de Montredon-Labessonnie, req. n° 170151) et,
  • sans avoir à retirer préalablement les éventuelles délégations dévolues aux conseillers municipaux.

Mais ce n’est pas tout.

On le sait, une fois que le maire a procédé à un tel retrait, il est tenu de convoquer le conseil municipal afin que celui-ci se prononce sur le maintien dans ses fonctions de l’adjoint auquel les délégations ont été retirées (article L. 2122-18 du CGCT).

Aussi, à ce stade, se posait une seconde question : quelles sont les conséquences du maintien ou non dans ses fonctions de l’adjoint, sur les délégations des conseillers municipaux ?

Sur ce point, le Conseil d’Etat distingue deux situations :

  • Soit «  le conseil municipal se prononce contre le maintien dans ses fonctions de l’adjoint auquel le maire a retiré ses délégations et que les adjoints demeurant en fonction sont tous pourvus de délégations, les délégations attribuées à des conseillers municipaux peuvent être maintenues, sans qu’il soit porté atteinte au droit de priorité des adjoints dans l’attribution des délégations ».
  • Soit « le conseil municipal se prononce pour le maintien dans ses fonctions de l’adjoint auquel le maire a retiré ses délégations, le maire est tenu de retirer sans délai les délégations attribuées à des conseillers municipaux, sauf à conférer à l’adjoint intéressé une nouvelle délégation».

Le Conseil d’Etat précise, enfin, que ces règles s’appliquent quel que soit le champ des délégations données par le maire à l’adjoint auquel il les retire et aux autres membres du conseil municipal.

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