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Vers une extension du périmètre des projets soumis à évaluation environnementale ?

Par un arrêt en date du 15 avril 2021, le Conseil d’Etat a annulé le décret n° 2018-435 du 4 juin 2018 portant modification des catégories de projets, plans et programmes relevant de l’évaluation environnementale au motif que la définition des seuils en deçà desquelles un projet n’est pas soumis à une évaluation environnementale est contraire au droit européen.

En l’espèce, l’association France Nature Environnement avait demandé au Conseil d’Etat d’annuler ce décret en raison de son absence de « clause filet », qui a pour effet de soumettre à évaluation environnementale les projets ayant une incidence sur l’environnement même s’ils ne figurent pas dans la nomenclature définie.

En effet, l’article L. 122-1 du code de l’environnement pose une obligation d’évaluation environnementale :

« Les projets qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine font l’objet d’une évaluation environnementale en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d’entre eux, après un examen au cas par cas effectué par l’autorité environnementale. »

Pour l’application de cet article, le décret de 2018 fixe les seuils en deçà desquelles un projet n’est pas soumis à une évaluation environnementale en retenant un critère principalement lié à la dimension du projet, notamment la taille ou la capacité de l’installation projetée, alors même que la directive européenne du 13 décembre 2011 concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement retenait un grand nombre de critères.

Ainsi, selon l’association, l’absence de soumission de certains projets à évaluation environnementale uniquement en raison de leurs petites dimensions serait contraire à la directive européenne.

Le Conseil d’Etat accueille favorablement la demande de l’association et annule le décret en tant qu’il ne prévoit pas de dispositions permettant de soumettre à une évaluation environnementales un projet susceptible d’avoir une incidence notable sur l’environnement pour d’autres critères que sa dimension.

Dans son arrêt, le Conseil d’Etat précise qu’il doit être tenu compte pour apprécier l’incidence des projets « d’une part, de leurs caractéristiques, en particulier leur nature et leurs dimensions, d’autre part, de leur localisation, notamment la sensibilité environnementale des zones géographiques qu’ils sont susceptibles d’affecter, et, enfin, de leurs impacts potentiels ».

Par ailleurs, le Conseil d’Etat enjoint au Premier Ministre de prendre les dispositions permettant de corriger cette insuffisance des critères pris en compte pour fixer le seuil de soumission d’un projet à une évaluation environnementale, en insistant sur la prise en compte de la localisation du projet.

Ainsi, le Premier Ministre dispose d’un délai de 9 mois pour prendre de nouvelles dispositions alors même que l’annulation immédiate du décret fait peser une incertitude sur la nécessité de procéder à une évaluation environnementale pour les projets publics et privés susceptibles d’avoir une incidence notable sur l’environnement ou la santé humaine.

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