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[Spécial Covid-19 – Ordonnance n°2020-306] Urbanisme – Focus sur les autorisations d’urbanisme pendant la période d’urgence sanitaire

Par une ordonnance du 25 mars 2020, le Gouvernement a prévu l’aménagement des délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent, selon l’article 1er de ladite ordonnance, entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire fixée actuellement le 24 mai 2020, selon l’article 3 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19. Ainsi la période précitée expirera le 24 juin 2020, sauf dans l’hypothèse d’une prorogation de cet état d’urgence.

Les délais de recours à l’encontre des autorisations d’urbanisme

L’article 2 de l’ordonnance précitée prévoit que les délais de recours gracieux et contentieux sont prorogés jusqu’à l’expiration d’un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de la période citée dans l’article 1er, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois.

Il en est donc ainsi des délais de recours à l’encontre des autorisations d’urbanisme, qui auraient dû expirer pendant la période précitée. Ces derniers sont prorogés jusqu’à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la fin de ladite période mentionné à l’article 1er de l’ordonnance.

Il faut rappeler que l’article R. 600-2 du code de l’urbanisme précise que le délai de recours court à l’égard des tiers à compter du premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage sur le terrain. Nonobstant l’absence de précision de l’ordonnance, il semble possible de considérer que dans le cas où cet affichage ne serait pas régulièrement effectué durant cette période de prorogation, le délai de recours n’aura pas commencé à courir à l’égard des tiers.

Par ailleurs, il en est de même pour toute « formalité » ou « notification » qui aurait dû être accomplie à peine d’irrecevabilité pendant la période d’urgence sanitaire susmentionnée. Autrement dit, le délai prévu pour accomplir l’obligation de notification des recours formés à l’encontre d’une autorisation d’urbanisme, prévue à l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme, est également prorogé jusqu’à l’expiration d’un délai de quinze jours à compter de la fin de la période citée à l’article 1er de l’ordonnance.

Le délai de validité des autorisations d’urbanisme

L’article 3 de l’ordonnance susmentionnée précise que les « mesures administratives » dont notamment les « autorisations » et « permis » dont le terme aurait dû intervenir durant la période d’urgence sanitaire, sont prorogées de plein droit jusqu’à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la fin de cette période.

Il en est donc ainsi des autorisations d’urbanisme, dont le délai de validité expirait à cette période notamment en raison de l’absence de sa mise en œuvre, ou de l’interruption des travaux, dans les conditions prévues à l’article R. 424-17 du code de l’urbanisme.

Ledit article précise que « Toutefois, le juge ou l’autorité compétente peut modifier ces mesures, ou y mettre fin, lorsqu’elles ont été prononcées avant le 12 mars 2020 ». Cette disposition permet donc de prévoir l’assouplissement, au cas par cas, de la prorogation du terme d’une mesure administrative ou juridictionnelle.

Le dépôt et l’instruction des autorisations d’urbanisme

Le Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales a diffusé le 21 mars 2020 des recommandations à l’attention des présidents des collectivités territoriales et des EPCI dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, selon lesquelles :

– « les services publics locaux facultatifs, jugés non essentiels, peuvent être fermés sur décision de l’autorité locale compétente, notamment (…) les services chargés de recueillir les demandes d’autorisations d’urbanisme » ;

– « les services d’urbanisme pourront voir leur activité réduite dès lors que le projet de loi d’urgence prévoit une suspension du délai légal de traitement des autorisations d’urbanisme. Ainsi, l’inactivité d’un service ne génèrera pas, au cours de cette période, une décision implicite de la commune ».

En toute hypothèse, même si certains services chargés de recueillir les demandes sont encore ouverts, ou permettent les dépôts par voie dématérialisée, l’article 7 de l’ordonnance prévoit que les délais à l’issue desquels une décision, un accord ou un avis d’une collectivité territoriale, peut ou doit intervenir ou est acquis implicitement et qui n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020 sont, à cette date, suspendus jusqu’à la fin de la période mentionnée à l’article 1er.

Il est également précisé que « Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir pendant la période mentionnée au I de l’article 1er est reporté jusqu’à l’achèvement de celle-ci » et que « Les mêmes règles s’appliquent aux délais impartis aux mêmes organismes ou personnes pour vérifier le caractère complet d’un dossier ou pour solliciter des pièces complémentaires dans le cadre de l’instruction d’une demande ainsi qu’aux délais prévus pour la consultation ou la participation du public ».

Ainsi, les délais d’instruction des autorisations d’urbanisme sont suspendus jusqu’à la fin de la période mentionnée à l’article 1er de l’ordonnance. En conséquence, aucune autorisation d’urbanisme tacite ne pourra naître durant cette période.

Les enquêtes publiques relatives à la réalisation de projets d’intérêt national ou urgent

L’article 12 de l’ordonnance prévoit la possibilité pour l’autorité compétente d’aménager les modalités de mise en œuvre des enquêtes publiques déjà en cours à la date du 12 mars 2020 ou devant être organisées pendant la période définie à l’article 1er, lorsque le retard résultant de l’interruption de l’enquête publique ou de l’impossibilité de l’accomplir en raison de l’état d’urgence sanitaire est susceptible d’entraîner des conséquences difficilement réparables dans la réalisation de projets présentant un intérêt national et un caractère urgent.

La mise en œuvre de ces enquêtes publiques pourra notamment être poursuivie de façon dématérialisée.

Sources et liens

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