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Le port de la barbe ne constitue pas, à lui seul, un signe religieux ostentatoire

Le 13 février 2014, le Directeur du Centre hospitalier de Saint-Denis a résilié la convention de stage conclue avec un praticien stagiaire associé au sein du service de chirurgie générale, viscérale et digestive, aux motifs qu’il refusait de tailler sa barbe pour en supprimer le caractère ostentatoire malgré les demandes répétées en ce sens et qu’il maîtrisait mal la langue française. Aucun motif lié aux exigences particulières de fonctionnement d’un bloc opératoire n’était invoqué dans la décision de résiliation.

Le praticien stagiaire a alors formé un recours contre la décision de résiliation de sa convention de stage mais sa requête a été rejetée tant par le tribunal administratif de Montreuil que par la Cour administrative d’appel de Versailles.

En effet, après avoir rappelé que « le port d’une barbe, même longue, ne saurait à lui seul constituer un signe d’appartenance religieuse en dehors d’éléments justifiant qu’il représente effectivement, dans les circonstances propres à l’espèce, la manifestation d’une revendication ou d’une appartenance religieuse », la Cour administrative d’appel de Versailles a considéré qu’en l’espèce, le port de la barbe par le praticien stagiaire était « perçue par les membres du personnel comme un signe d’appartenance religieuse » et que « son apparence physique était de nature à manifester ostensiblement un engagement religieux », « alors même que le port de sa barbe ne s’est accompagné d’aucun acte de prosélytisme ni d’observations des usagers du service ». La Cour administrative d’appel de Versailles a donc rejeté la requête du praticien stagiaire au motif que ce dernier devait « être regardé comme ayant manqué à ses obligations au regard du respect de la laïcité et du principe de neutralité du service public » (CAA Versailles, 19 décembre 2017, n°15VE03582).

Le Conseil d’Etat a censuré le raisonnement suivi par la Cour administrative d’appel de Versailles en considérant que les éléments sur lesquels s’était fondée la Cour étaient insuffisants pour caractériser la manifestation de convictions religieuses dans le cadre du service public. Pour le Conseil d’Etat, le seul port de la barbe, quelle qu’en soit sa longueur, le refus du praticien stagiaire de la tailler et la conscience de ce dernier de ce que sa barbe pouvait être perçue par ses collègues comme un signe d’appartenance religieuse ne suffisent pas, sans autre indice, à caractériser un manquement au principe de neutralité du service public et au respect de la laïcité :

« 3. Pour juger que M. A… avait manqué aux obligations qui viennent d’être rappelées, la cour administrative d’appel s’est fondée sur ce que, alors même que la barbe qu’il portait ne pouvait, malgré sa taille, être regardée comme étant par elle-même un signe d’appartenance religieuse, il avait refusé de la tailler et n’avait pas nié que son apparence physique pouvait être perçue comme un signe d’appartenance religieuse. En se fondant sur ces seuls éléments, par eux-mêmes insuffisants pour caractériser la manifestation de convictions religieuses dans le cadre du service public, sans retenir aucune autre circonstance susceptible d’établir que M. A… aurait manifesté de telles convictions dans l’exercice de ses fonctions, la cour a entaché son arrêt d’erreur de droit ».

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