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Contrats : Conséquences de l’application d’une clause de tacite reconduction

Le Conseil d’Etat a récemment rappelé que lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l’exécution du contrat qui les lie, ce dernier ne peut se contenter d’écarter le contrat au seul motif que les irrégularités invoquées, se rattachant à la procédure de passation du contrat, ne concernent ni le contenu du contrat, ni les conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement.

Le juge doit nécessairement rechercher si la gravité de ces irrégularités et les circonstances dans lesquelles elles ont été commises imposent d’écarter le contrat.

La cour administrative d’appel de Bordeaux a donc commis une erreur de droit en jugeant que les irrégularités affectant la passation du contrat de mobilier urbain conclu entre la Commune de Baie-Mahault et la société Serco ne pouvaient permettre d’écarter l’application du contrat, sans procéder à une analyse de la gravité de ces irrégularités et des circonstances dans lesquelles elles ont été commises.

Jugeant l’affaire au fond, le Conseil d’Etat a estimé que les vices affectant le contrat initial n’étaient pas susceptibles de conduire à écarter le contrat, mais, qu’en revanche, l’application d’une clause de tacite reconduction devait être regardée comme particulièrement grave et ne permettant pas de régler le litige sur le terrain contractuel :

« Qu’il résulte de l’instruction que, dès le premier renouvellement en 2001, les parties ne pouvaient ignorer que l’application de cette clause constituait une violation manifeste des règles de la commande publique et avaient pour effet de prolonger de cinq ans un marché conclu initialement pour une longue durée ; qu’en l’espèce, l’application de cette clause ne pouvait que manifester une volonté de faire obstacle aux règles de la concurrence pour faire bénéficier la société Serco de l’exclusivité de ces prestations ; que dans les circonstances de l’espèce, cette irrégularité doit être regardée comme particulièrement grave et comme ne permettant pas de régler le litige sur le terrain contractuel à compter du renouvellement du contrat en 2001. »

La société SERCO n’a donc obtenu que le remboursement des seules dépenses utiles à la collectivité, à compter du renouvellement du contrat par tacite reconduction en 2001, sur le terrain quasi-contractuel.

Le Conseil d’Etat a estimé, en outre, que la société SERCO n’était pas fondée à invoquer la faute commise par la Commune de Baie-Mahaut pour obtenir une indemnisation sur un terrain quasi-délictuel, dès lors qu’elle a elle-même « commis une faute en se prêtant volontairement à des renouvellements dont, compte-tenu de son expérience, elle ne pouvait ignorer l’illégalité ».

Sources et liens

CE, 10 octobre 2012, Commune de Baie-Mahault, req. n°340647

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